Le physicien sénégalais Sidy Ndao, lauréat 2017 – 2019 du Next Einstein Forum, en est convaincu: la maîtrise des expériences est une condition indispensable à la réalisation d’innovations. C’est ce qu’il met en pratique dans ses travaux, et c’est aussi ce dont il veut faire profiter la jeunesse sénégalaise (et même pan-Africaine) de cette expérience acquise aux Etats-Unis : il a créé une université dans son pays d’origine, et un concours de robotique à l’échelle du continent.
Dans son travail scientifique à l’université du Nebraska, à Lincoln, au coeur des Etats-Unis, Sidy Ndao ne néglige pas la théorie. Ce sont en effet des calculs qui lui ont permis de concevoir la “diode à chaleur” qu’il a présentée en mars 2017 avec son collaborateur Mahmoud Elkouza. En physique des solides, la chaleur est transportée par des photons, et par des particules virtuelles appelées phonons, qui obéissent à des équations pas très différentes de celles qui régissent le comportement des électrons. Il “suffisait” donc de calculer les caractéristiques du matériau permettant d’en maîtriser la circulation.
Mais ces résultats n’auraient pas reçu autant d’écho s’ils n’avaient été accompagnés de la fabrication effective du dispositif et de la démonstration pratique de ses performances. D’ailleurs, l’objectif de Sidy Ndao est la résolution d’un problème très pratique : fabriquer des ordinateurs capables de fonctionner dans des conditions extrêmes, telles que celles qui règnent à la surface de la planète Vénus (460°C et près de 100 fois la pression atmosphérique terrestre au sol en moyenne) ou au fond des volcans terrestres.
Sidy Ndao le sait bien, si ses parents n’avaient pas fait le choix de l’envoyer étudier à New-York dès ses 16 ans, il aurait eu plus de difficultés à développer ses capacités expérimentales. Il est de notoriété publique qu’en Afrique, de très nombreux lycées, et même universités, manquent des matériels les plus élémentaires pour proposer des travaux pratiques.
Pour y remédier, et tout en restant travailler la plus grande partie de l’année aux Etats-Unis, il a donc décidé de créer une université privée au Sénégal : à la rentrée 2016, la Dakar University of Science and Technology a ouvert à Somone, à une trentaine de kilomètres de Dakar. Elle accueille pour l’instant une quarantaine d’étudiants de la sous-région, pour des cours donnés en anglais par des professeurs formés en Europe ou aux Etats-Unis. L’accent est mis sur la recherche et sur les travaux pratiques.
Dans le même esprit, Sidy Ndao a, aussi en 2016, créé la Panafrican Robotic Competition. Chaque année, des équipes de différents niveaux s’affrontent sur des thèmes spécifiques. La prochaine édition prendra une ampleur supplémentaire, puisqu’elle aura lieu au Rwanda, à Kigali, pendant la Rencontre Internationale du Next Einstein Forum. Chaque équipe aura eu six semaines pour se préparer à domicile. Ensuite, elle présentera sa réalisation (en Français ou en Anglais).
Ces équipes de quatre à huit membres s’affronteront dans quatre catégories, dont les thèmes sont tous liés cette année à la santé. Les plus jeunes (11 à 15 ans, catégorie “Tech League”) s’intéresseront à l’usage des robots en cas d’épidémie : évacuation différenciées des personnes selon qu’elles sont infectées ou non, distribution des médicaments, surveillance et quarantaine. La “Stars League” (15 à 19 ans) devra présenter des robots qui fabriquent des médicaments. Dans la même tranche d’âge, la “Makers League” permettra de présenter des maquettes de l’hôpital du futur. Enfin, l’”Engineers League” verra s’affronter des équipes d’étudiants de la licence au master autour de prothèses et autres logiciels destinés à améliorer la vie des personnes handicapées.
Sidy Ndao s’engage pour développer l’enseignement expérimental en Afrique
February 9, 2018