Par Aretha Mare
Les startups d’Afrique du Nord se distinguent sur le continent par le nombre d’investissements contractés, la création de produits capables de s’adapter et de répondre à un changement d’ordre de grandeur de la demande et d’un cadre politique propice à l’entreprenariat et à l’innovation. Par exemple, la Start-Up Act lancée en 2018 par le gouvernement tunisien est ainsi devenue un cadre juridique de référence transposable dans d’autres pays. De plus, cette région bénéficie également d’une variété de fonds dédiés aux startups qui prennent en compte le caractère évolutif de l’entreprenariat et les différents stades de développement de cette activité particulière. Voici les trois facteurs clés qui contribuent à leur réussite et qui seraient susceptibles d’attirer plus investissements en Afrique :
- Une myriade de fonds disponibles
L’Afrique du Nord dispose d’une diversité de sources de financements disponibles, dont la majorité provienne de capitaux-risques, voués aux entrepreneurs innovants. À cette liste d’investisseurs s’ajoute aussi des incubateurs, des financiers avec des capitaux propres, des business angels, des bailleurs de fonds issus du secteur à but non-lucratif, pour ne citer qu’eux.
Rien que pour 2019, une étude menée par Ventureburn a estimé que 15 startups d’Afrique du Nord ont bénéficié d’un apport financier issu de fonds de capital-risque à hauteur de 64.1 millions de dollars, lesquels ciblaient des jeunes entreprises prometteuses dans les secteurs la fintech, la mobilité, l’intelligence artificielle, l’e-commerce, les technologies propres, la culture voire encore la sécurité cybernétique.
Des capitaux qui prennent aussi en considération les communautés isolées ou mal desservies dans les marchés émergents, comme le fait la société Bamboo Capital Partners. D’autres, originaires du secteur non-lucratif par exemple, apportent des « fonds d’essai » alloués aux startups à fort potentiel d’impact ou adoptent des approches multidimensionnelles. C’est le cas de Modus Capital qui investit plus 75 millions de dollars dans des sociétés régionales en phase de croissance, tout en offrant des programmes d’incubation et des espaces de travail partagé.
Autant de capitaux qui ont donné l’occasion à la startup égyptienne, Swvl, de lever 42 millions de dollars et à la société tunisienne InstaDeep active dans l’IA de recevoir 7 millions de dollars d’investissement provenant d’un financement « Serie A » voire d’être même rachetée, comme Uber qui s’est octroyée Careem pour la coquette somme de 3.1 milliards de dollars.
- Situation géographique avantageuse
Le second élément est issu de la position géographique avantageuse de l’Afrique du Nord. Grâce à des liens historiques et culturelles particuliers, les startups de cette sous-région ont la possibilité d’avoir un accès plus aisé à un ensemble de fonds et de soutiens principalement destinés à la région MENA, comme le démontre le déblocage de 250 millions de dollars par Mubadal – un fond souverain d’investissements des Émirats arabes unis – et le lancement d’un fond de 100 millions de dollars par une société de capital-risque située près de Dubaï. Un contexte donc qui permet aux startups nord-africaines d’étendre plus facilement leurs activités vers les marchés avoisinants, plus tôt que vers le reste de l’Afrique.
- Des talents à former
Le troisième facteur clé se situe dans l’existence d’efforts délibérés dans la région de cultiver et former des jeunes talents pour les préparer à des carrières dans les domaines de la technologie et de l’entreprenariat. Des initiatives, comme le Centre algérien pour les STIM, le projet égyptien d’établir une école dédiée aux domaines des STIM et des programmes gérés par Flat6labs et Endeavor, qui s’ajoutent aux efforts des autorités publiques, contribuent activement au développement d’un écosystème entrepreneurial dynamique lié aux technologies.
Selon la plateforme Github, le Maroc et l’Égypte se classent parmi les 5 pays qui connaissent la plus forte croissance du nombre de concepteurs en Afrique. Ainsi, le Royaume chérifien apparait comme l’État dont les dépenses dans les domaines de la Recherche et du Développement (R&D) sont les plus élevés et représentent 0.71% de son Produit intérieur brut (PIB). L’Égypte quant à elle possède le taux le plus élevé de créateurs de startups (25.7%) et d’entreprises en stade « d’amorçage » (26.6%) dans la zone MENA. Un contexte propice à l’innovation dans lequel il faut ajouter les jeunes ayant obtenu leur diplôme à l’étranger qui à leur retour ramènent avec eux des relations, une expérience et un savoir-faire pour lancer des startups et devenir des entrepreneurs performants.
Autant d’illustrations qui démontrent que les startups nord-africaines qui recueillent le plus de fonds sont celles qui reposent sur les nouvelles technologies qui touchent tous les pans de l’économie liée à la 4ème révolution industrielle, comme l’économie collaborative, numérique, circulaire et celle portant sur l’émission de carbone.
Ces “trois facteurs-clés” – la disponibilité de fonds financiers diversifiés, l’exploitation des avantages offerts par la situation géographique et la formation des talents – constituent les meilleures pratiques propices à l’innovation et à l’essor d’un écosystème dynamique. Cependant, quelques obstacles entravent encore l’harmonisation de ce potentiel au niveau continental: a) le marché interne reste relativement isolé et b) le flux des biens et services entre l’Afrique du Nord et l’Afrique subsaharienne doit devenir plus efficace. Deux barrières qui, aussitôt levées, permettraient aux startups innovantes de se développer à l’échelle de toute l’Afrique.
Découvrez plus au sujet des startups nord africaines lors du NEF2020.